Stress et Burn-Out
Le burn-out, phase ultime du stress
Pourquoi le thème de la souffrance au travail n’est-il pas abordé dans les débats politiques?
Article publié dans Le Huffington Post par Dr Dan VELEA, psychiatre, spécialiste du stress
Le stress au travail et ses conséquences représentent un motif de consultation de plus en plus fréquent, et ne se limite plus aux cadres. Mais la collaboration entre médecins du travail et médecins de ville est encore balbutiante…
La médiatisation récente des suicides chez Renault a remis sur le devant de la scène un phénomène connu depuis longtemps au Japon comme « syndrome de Karochi », responsable de plusieurs centaines de décès par an dans l’archipel nippon, principalement par crise cardiaque ou suicide consécutifs à un épuisement – l’équivalent japonais du fameux burn-out. En France, nous n’en sommes pas là, mais on estime néanmoins que 5 à 10 % des salariés sont concernées par le stress professionnel à des degrés plus ou moins élevés. « Le nombre d’heures travaillées n’a cessé de baisser au cours des dernières années, mais l’exigence de performance, le rythme de travail, l’instabilité et la précarité ont terriblement augmenté. Avant, le stress professionnel concernait surtout les cadres, mais aujourd’hui personne n’est épargné, même les travailleurs indépendants. Certaines professions, comme les policiers, les enseignants ou le corps médical, sont particulièrement touchées », constate le Dr Dan Véléa.
Psy ou coach ?
Alors que les femmes ont facilement recours à l’automédication (benzodiazépines, etc.), les hommes consultent davantage, et préfèrent se tourner vers l’alcool et les substances stimulantes. Certains symptômes du burn-out s’apparentent à ceux des troubles anxio-dépressifs : démotivation, tension, difficulté à se concentrer, manque de confiance en soi, anhédonie, troubles du sommeil… Pour les distinguer, il est important de bien évaluer dans quel contexte les symptômes sont apparus. « Les patients parlent souvent de harcèlement. Ils se plaignent de troubles psychosomatiques de type digestif (maux d’estomac, diarrhées), musculo-squelettiques (mal de dos), de courbatures, de transpiration, de tachycardie… », précise le Dr Dan Véléa. Face à un patient épuisé, un bilan sanguin complet est indispensable.
La prise en charge repose sur les traitements médicamenteux (anti-dépresseurs ou anxiolitiques essentiellement), mais aussi sur la psychothérapie et les techniques de relaxation, pour apprendre à mieux gérer les tâches, prendre du recul et retrouver confiance en soi. « Parfois, un cadre stressé accepte plus volontiers d’aller voir un coach qu’un psy. Ce n’est pas la casquette qui compte, l’essentiel est que quelqu’un l’aide à se sentir « à sa place » dans son job, estime Dan Véléa. Il regrette que la collaboration entre médecins du travail et médecins de ville dans ce domaine soit quasi-inexistante, et qu’il n’y ait que très peu de réseaux et de FMC sur la gestion du stress et l’amélioration des conditions de travail.
Les cycles biologiques du stress
Dès 1950, Selye a décrit le « Syndrome Général d’Adaptation » (SGA) ou encore « stress », qui représente l’ensemble des réactions d’adaptation de l’organisme face à une menace. Il y a tout d’abord la phase d’alarme avec son choc et contre-choc, la phase de résistance, et pour finir la phase d’épuisement. La phase d’alarme, qui peut durer de quelques minutes à 24 heures, se caractérise par la production d’adrénaline et de noradrénaline qui augmentent la pression artérielle, accélèrent le rythme cardiaque et la respiration puis le taux de sucre dans le sang. Lors de la phase de résistance, l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénal sécrète le « corticotropin releasing factor » et induit une production de corticotropine (ACTH). Le corps cherche une nouvelle énergie, combat les inflammations possibles et cherche à renforcer ses manques. Si le stress persiste trop longtemps sans récupération possible, arrive la phase d’épuisement. Le cortisol est épuisé et l’organisme ne peut plus s’adapter à ce qui lui est demandé. Il décompense en dysfonctionnant (ulcères, hypertension voire infarctus, asthme, eczéma, cancer, etc.)