Les addictions à Internet
Depuis le milieu des années 80, notre société subit de profonds bouleversements qui concernent à la fois l’environnement quotidien, mais aussi le système de valeurs sensé structurer, organiser et donner sens à l’ensemble.
Même si les termes de la citation prêtent à débat, Malraux aurait dit que « le XXIème siècle sera spirituel ou ne sera pas ». Qu’il ait employé le terme de spirituel, de religieux ou de mystique, nous voyons bien que notre monde actuel, hyper matérialiste, individualiste et consumériste ne semble pas s’engager dans la direction de l’être au sens où l’entendait Malraux..
Cette crise de sens des sociétés industrielles aboutit à un sentiment de panique générale où chacun, pour son propre compte, poursuit des chimères dont il ne connaît ni l’origine, ni la signification, ni le but. Cette agitation universelle trouve ses objets, par exemple, dans les nouvelles techniques de communications, dans la folie du zapping, dans l’intolérance à la frustration ou à l’attente, et aboutit au bout du compte à la disparition du désir. La société de ce début de XXIème siècle fonctionne comme le toxicomane des années 80 qui s’abîmait, dans tous les sens du terme, dans «le tout, tout de suite ».
Cette frénésie tout azimut, cette fuite en avant, cette hyperactivité généralisée cherchent à masquer la crainte principale qui agite notre époque, celle de l’ennui.
L’ennui est au mieux considéré comme une perte de temps, comme l’inexploitation d’un potentiel ainsi gâché, comme un laisser aller inacceptable. Au pire l’ennui est vécu comme un équivalent de mort, un abîme de vide qui rendrait fou.
Devant une telle menace commune, le courage semblerait dans la fuite.
Les stratégies de fuite sont multiples : de la recherche effrénée de compétition, à l’oubli dans les médicaments (les français sont les plus grands consommateurs européens de psychotropes) ou les drogues, du dopage au quotidien aux attitudes multiples de zapping sous toutes ses formes, échapper à la réalité semble devenu l’obsession commune.
Echapper à la réalité pour confectionner une vie où, par une frénésie de consommation, les objets du bonheur remplacent le bonheur lui-même, où une vie réinventée et virtuelle remplace la vie réelle.
Dans cette optique, un outil devient emblématique de cette quête : Internet.
Dans cet ouvrage nous montrerons que ce qui fait le succès d’Internet est son aptitude à répondre à tous les questionnements que nous venons d’évoquer, à combler tous les manques que nos contemporains subissent ou, le plus souvent, ont peur de subir. Internet est devenu le support de toutes les substitutions. Le nouveau monde est un cybermonde générant à la fois ces possibilités de résolution mais également porteur de doutes, d’angoisses et d’effets paradoxaux
Parmi toutes les angoisses que peuvent ressentir les parents au sujet de leurs enfants, celles concernant la gestion des objets que façonnent le progrès se trouvent au premier plan. Qu’il s’agisse de la télévision, du balladeur, des jeux vidéos ou des téléphones portables, la question s’est toujours posée dans les même termes : est-ce un réel danger, peut-il y a avoir abus, comment prévenir les risques, doit-on autoriser ou interdire ?
La survenue d’Internet n’échappe ni à ces questionnements, ni à ces craintes.
C’est aussi une des ambitions de ce livre que de faire à la fois le point sur la situation actuelle, mais aussi de démêler les justes préoccupations des craintes injustifiées, et de définir le cadre d’un bon usage de cet outil Internet qui s’est installé, évidemment de façon durable, dans notre vie quotidienne.