Les écrans

1/ Gare aux piétons zombies. Les accidents de la circulation dus à une inattention liée à l’usage de smartphones ou tablettes ont beaucoup augmenté depuis 10 ans, comme le montrait une étude publiée en 2013 dans la revue Accident Analysis & Prevention par le Pr Jack Nasar, de l’université de l’Ohio aux Etats-Unis. Les piétons restent parfois les yeux rivés sur un écran pendant qu’ils traversent une route. Pourquoi a-t-on autant de mal à se détacher des écrans au risque de négliger noter sécurité ?

Nouvelle addiction, la dépendance aux technologies de l’informatique et de la communication apparaît sous diverses formes – dépendance aux écrans, aux jeux vidéo et aux sites Web – reconnues par les spécialistes depuis une vingtaine d’années. Tout au début, les constatations cliniques étaient réduites, mais les développements sans précédent de ces technologies, ont occasionné une véritable explosion des demandes de consultations de la part des patients, des familles mais de l’environnement professionnel. Il est important – pour les professionnels confrontés à ces demandes, mais aussi pour les patients – de préciser s’il s’agit d’une véritable addiction (définie par une focalisation des centres d’intérêts que sur l’utilisation des supports informatique et de la communication, par une souffrance occasionnée par l’absence de ces outils) et surtout d’un mésusage (dans un excès quasi quotidien) de ces outils. Dans tous les cas, les personnes concernées utilisent de manière effrénée ces outils, avec une perte de repères spatio-temporelles (souvent des cas de piétons, ou dans les moyens de transport, mais aussi au volant par des conducteurs négligents. On voit régulièrement des cas extrême, des piétons qui ont les yeux rivés sur un écran (certains en train de jouer, d’autres de lire des courriers…), sans faire attention aux alentours, se mettant de cette manière en danger. Il s’agit d’une preuve de plus de cet aspect addictif des écrans, de la perte de repères, qui occasionne des dangers pour les personnes. C’est notre société, celle de l’hyper communication, de l’immédiaté, de l’absence de résistance face aux frustrations.

2/ L’usage des oreillettes pour téléphoner au volant vient d’être interdit en France, la Suisse a mené en mai dernier une campagne de prévention face à l’innatention des piétons, quelles autres mesures de prévention peuvent-être envisagées? Certaines, peut-être fort simples, ont-elles déjà prouvé leur efficacité ?

Tout message de prévention doit tenir compte de la frustration engendrée par la réduction de ce « loisir » devenu moyen incontournable pour exprimer des émotions, pour se sociabiliser. Revenir à des moyens plus naturels pour communiquer, maintenir un contact réel avec ses amis sont des conditions nécessaires à accepter par les usagers. Il est aussi du devoir fournisseurs d’accès, des réseaux sociaux, de faire de la prévention.

3/ Au delà de notre attention lors de nos déplacements, les écrans provoquent-ils une réelle perte de concentration lorsque nous naviguons d’applications en pages Web? Qu’est-ce que la « désorientation cognitive » dont parlent les psychiatres ?

Notre cerveau est capable de supporter pour une durée limitée les sur sollicitations sensorielles, mais au-delà d’un effet seuil, les capacités de concentration, d’attention et de vigilance diminuent. Il faut tirer la conclusion que notre cerveau a du mal de fonctionner de manière prolongée dans un mode « multitâche », que nos capacités diminuent après ces surcharges de sollicitations. Il n’est pas anodins que les fabricants de smartphones préconisent justement un mode d’usage monotâche, afin d’éviter ces épuisements.

4/ Les écrans, comme l’écriture et l’imprimerie précédemment, font-ils évoluer notre façon de penser? Si l’on part du postulat d’un renoncement d’un processus de pensée linéaire, n’est-ce pas au profit du développement d’une pensée en réseau, circulaire, fonctionnant par analogies?

Il est indéniable que cette révolution du savoir et du partage des connaissance, représente un tournant majeur dans la société actuelle, dont il faut se préparer, savoir l’utiliser et le maîtriser. On parle de plus en plus des « Brainent », des connexions interneurones, des réseaux de partage et d’enrichissement de la connaissance (inspiré de Wikipédia). Toute cette révolution nécessite un apprentissage approfondi, une redéfinition de nos rapports aux savoir

Docteur Dan VELEA
Psychiatre-addictologue
Le Docteur Dan VELEA, médecin psychiatre-addictologue-psychothérapeute est installé rue de Rennes dans le 6ème arrdt. à Paris.
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